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Date : 02-02-2024 15:32:55
TRIBUNE
Conseil constitutionnel et loi immigration : le naufrage démocratique
En censurant un tiers des articles, les Sages ont pris « une décision politique », déplore Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France.
Par Valérie Pécresse Publié le 02/02/2024 à 06h30
La décision du Conseil constitutionnel censurant la loi immigration s'apparente à un naufrage démocratique. En effet, face à un texte dont dépend la cohésion de la nation et attendu par une large majorité de Français, le Conseil a pratiqué une forme d'esquive juridique, qui fait fi de la volonté du législateur mais, surtout, qui ne tient pas compte de la nouvelle donne institutionnelle de notre pays : l'absence de majorité absolue au Parlement.
Pour balayer un tiers (!) du contenu de la loi sans l'examiner sur le fond, le Conseil a choisi de faire une lecture ultra-rigoriste de l'article 45 de notre Constitution, aux termes duquel seuls sont recevables les amendements qui « présentent un lien, même indirect, avec le texte déposé ». Les autres sont des « cavaliers ». Le Conseil a ainsi censuré la plupart des articles fruits de la négociation entre Mme Borne et l'opposition de droite !
Cette interprétation est une insulte au bon sens. Des articles portant sur les règles d'acquisition ou de déchéance de la nationalité, sur le regroupement familial ou la durée de séjour pour obtenir une prestation sociale seraient dépourvus de lien direct ou indirect avec une loi dont l'objet est de « contrôler l'immigration » ? Tout au contraire, ces articles ajoutés venaient compléter le texte. Alors, certes, ils changeaient la philosophie du texte initial. Mais dire cela, c'est porter une appréciation politique, chose que le Conseil constitutionnel n'est pas censé faire, quand il applique l'article 45.
Une décision politique, qui ne dit pas son nom
Oui, en faisant preuve de cet hyper-juridisme, le Conseil constitutionnel a en réalité pris une décision politique, qui ne dit pas son nom. Il aurait pu, à l'inverse, tout aussi bien considérer que ces dispositions étaient recevables, et ce d'autant plus que la volonté des pouvoirs exécutif et législatif était bien de trouver un compromis.
On ne peut dès lors que s'interroger sur ses motivations.
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