A la retraite,
Ils prennent leur temps,
L’heure n’a plus d’importance,
Sauf pour les médicaments
Qui règlent leur existence.
Et quand enfin vient l’heure
De se dire adieu,
Au moment de partir pour les cieux,
Dans leurs yeux il y a des pleurs,
Dernier tic-tac pour un doux vieux.
Chibani
Autrefois pour faire sa cour
On parlait d'amour
Pour mieux prouver son ardeur
on offrait son coeur
Maintenant c'est plus pareil
Ça change ça change
pour séduire le cher ange
on lui glisse à l'oreille
Ah ! Gudule
Viens m'embrasser
Et je te donnerai
Un frigidaire
Un joli scoutaire
Un atomixère
Et du Dunlopillo
Une cuisinière
Avec un four en verre
Des tas de couverts
Et des pelles à gâteaux
Une tourniquette
Pour faire la vinaigrette
Un bel aérateur
Pour bouffer les odeurs
Des draps qui chauffent
Un pistolet à gaufres
Un avion pour deux (pause)
Et nous serons heureux ...
Autrefois s'il arrivait
Que l'on se querelle
L’air lugubre on s'en allait
En laissant la vaisselle
Maintenant que voulez-vous
La vie est si chère
On dit rentre chez ta mère
Et on se garde tout
Ah ! Gudule
Excuse-toi
Ou je reprends tout ça
Mon frigidaire
Mon armoire à cuillères
Mon évier en fer
Et mon poêle à mazout
Mon cire-godasses
Mon repasse-limaces
Mon tabouret à glace ...
Et mon chasse-filous
La tourniquette
A faire la vinaigrette
Le ratatine-ordures
Et le coupe-friture
Et si la belle
Se montre encore rebelle
On la fiche dehors
pour confier son sort
Au frigidaire
À l'efface-poussière
À la cuisinière
Au lit qu'est toujours fait
Au chauffe-savates
Au canon à patates
À l'éventre-tomates
À l'écorche-poulet ...
Mais très très vite
on reçoit la visite
D'une tendre petite
Qui nous offre son coeur
Alors on cède
Car il faut qu’on s’entraide
Et l’on vit comme ça
Jusqu’à la prochaine fois
Et l'on vit comme ça
Jusqu'à la prochaine fois
Et l'on vit comme ça
Jusqu'à la prochaine fois.
Boris Vian - La Complainte Du Progrès